Pilot-Namiki « L’Empereur »

Le créateur du stylo en laque

La société Pilot fut créée en 1918 au Japon par Ryosuke Namiki et « Masao Wada, tous deux anciens officiers de la marine marchande.

Ils entendaient en choisissant ce nom affir¬mer leur volonté d’innovation en matière d’écriture, piloto désignant en japonais le navire amiral qui montre la voie. Leur logo prit la forme d’une bouée de sauvetage.

Pilot commença par fabriquer des porte-plume de bureau en bois, des stylos à compte-gouttes, des safeties, des stylos à rem¬plissage à piston ou à levier.

En 1925, alors que le Japon s’était ouvert à l’influence occidentale, les deux asso¬ciés avaient pris conscience qu’il fallait innover pour parer au succès des importations étran¬gères. L’ébonite dont étaient faits les stylos se décolorait à la lumière naturelle au fil du temps. Namiki eut alors l’idée de recouvrir le corps du stylo d’une laque naturelle, dont il déposa le brevet sous le nom de Laccanite. Un peu plus tard, il décida de décorer la laque. Pour ce faire, il eut recours à Gonroku Matsuda, le plus grand maître laqueur de l’époque, qui maîtrisait la technique ances­trale de l’urushi, du nom d’un arbre dont la sève possède d’incomparables qualités de résistance. Matsuda connaiss les secrets de l’application de la laque en couches fines et si cessives. Il maniait avec l’habileté la plus extrême les poud d’or, d’argent, de plomb et de cuivre qui, selon la métho de décoration du Maki-e, permettaient de réaliser les laqt les plus délicats du monde.

Les entreprises japonaises de l’époque pratiquait couramment un mécénat destiné à protéger les techniques les formes d’expression traditionnelles des influences oc dentales. Dans cet esprit, Namiki confia à Matsuda la en tion, au sein de la société, d’une école artistique appel Kokkokai (« Association des lumières du pays »). Les p: miers stylos de laque y furent fabriqués, puis exportés  dès 1925. lIs remportèrent 1 succès immense. On racor encore comment Setsuji Wac fils de l’associé de Nami. chargé de la commercial! tion, persuada Harrod’s référencer la marque : il j< un stylo la plume en avant s le plancher du grand magasin, où il se planta, intact... Démonstration violente et spectacu¬laire qui intronisa la marque nipponne dans le temple de la consommation londonienne !

En 1926, Pilot ouvrit des succursales à New York, Londres, Shanghai et Singapour. Le Britannique Alfred Dunhill fut tellement fasciné par la beauté des stylos laqués qu’il les distribua en France. Il voulut même les vendre sous sa propre marque, mais Wada s’y opposa. Sur les marchés européen et américain, ils furent donc commercialisés avec l’inscription « Dunhill-Namiki Made in Japan ». Ce contrat prit fin après la Seconde Guerre mondiale. Les stylos Dunhill- Namiki sont aujourd’hui très recherchés par les collection¬neurs du monde entier. Qu’ils soient à compte-gouttes, à levier ou même à cartouche, les systèmes de remplissage ayant évolué avec le temps, ils ont tous la même beauté.

L’école Kokkokai perpétue toujours la tradition de la laque et fait de chaque stylo une oeuvre d’art d’exception. Ainsi l’« Empereur », en laque unie ou décorée, qui impres¬sionne par sa taille : 17 centimètres de long et 2 centimètres de diamètre. « Avant tout on reconnaît un Namiki à la beauté et à la perfection de sa laque, à la profondeur de sa couleur, à la délicatesse de son décor, dit Kami Tatsuno, le plus grand collectionneur de stylos au monde. Il se distingue par sa forme de cigare, la signature du maître laqueur qui l’a exécuté, par sa plume, et lorsqu’il s’agit d’un système à levier, grâce à la bouée gravée d’un N qui orne ce dernier. »

Extrait de 100 Stylos de Légende de Nathalie Valax, Isabelle Chabeur et Bruno Lussato édité en Septembre 2001 chez les Editions SOLAR Paris